9 décembre, du neuf toujours tout neuf

Nous sommes de ceux qui considèrent l'obsolescence programmée et le « prêt à jeter » comme une insulte. Une insulte à l'intelligence (celle des consommateurs et des ingénieurs amenés à saboter leur propre travail) une insulte à l'humanité (car on sait que l'exploitation industrielle de certaines ressources précieuses créent des gouffres d'inégalités sociales) et une insulte à la planète (dont les ressources ne sont pas infinies). Si dans le domaine de l'informatique et de la téléphonie il est presque impossible d'y échapper en tant que consommateur, on se réjouit que le phénomène puisse être évité ou du moins ralenti en Hi-Fi. Certes, nous avons connu 3 changements de support en 120 ans, mais les heureux possesseurs d'une belle collection de vinyles peuvent encore en profiter aujourd'hui. De plus, nombreux constructeurs sérieux font de véritables efforts pour assurer la longévité des produits dans le temps.

 Pour éviter l'obsolescence, il y a trois aspects à prendre en compte :
- la solidité du produit (ça c'est plutôt évident)
- sa mise à niveau à mesure que progressent les composants électroniques (si j'achète aujourd'hui, est-ce que je me condamne à être ringard dans 10 ans?)
-son évolutivité en cas de rupture technologique (que ferons nous quand le bluetooth sera remplacé par un green ou un purpletooth? )

1) La solidité : En matière de solidité, nous passons souvent pour d'étranges dinosaures car nos cartes sont larges et très lisibles, soudées à la main, avec des composants de « qualité militaire » , bien identifiés, et toujours implémentés sur une seule couche. Cela rend la maintenance très facile : on peut repérer et remplacer un composant défectueux, notamment les pièces d'usure qui commencent à fatiguer au bout d'une trentaine d'année (le fameux potentiomètre qui crache et les condensateurs épuisés) Chaque carte est munie d'un radiateur passif très efficace pour éviter la surchauffe. Enfin, nos amplificateurs fonctionnent avec un très faible courant de repos (la fameuse classe B, injustement critiquée) donc notez donc qu'ils consomment peu et que cela constitue une protection supplémentaire pour les composants de la carte.



Il en résulte des amplificateurs imposants, mais ce sont des paquebots prêts à traverser des océans temporels. La miniaturisation est séduisante, mais là où l'on gagne en légèreté et en design, on perd souvent en longévité.

En 1975, en construisant mon premier amplificateur Klinger Favre, je me suis immédiatement posé la question de la maintenance de cet appareil. Pour rien au monde, je n'envisageais qu'on laisse mourir un appareil entier pour un seul composant à changer.
Mais comment gérer une panne à distance ?
 Tout naturellement, j'ai dessiné l'amplificateur selon un principe de carte mère et de cartes filles, (aujourd'hui, avec les PC cela paraît banal, mais ça l'était beaucoup moins à l'époque !) avec des leds rouge en façade des modules, pour localiser facilement l'origine d'un problème. En cas de panne, le client envoie la carte suspecte et je la répare.
Par chance, ou par application, j'ai finalement connu assez peu de pannes.
Par contre, cette architecture électronique m'a permis de faire évoluer les produits dans le temps.
 



2) La mise à niveau : Dès 1975, j'ai décidé une fois pour toute que je conserverais le même connecteur et le même schéma d'implantation « plus, moins, masse, entrée, sortie » afin de conserver une compatibilité avec les cartes d'amplification du futur. A ce jour, fidèles à cette promesse, nous utilisons toujours ce dessin et ces connecteurs, ce qui nous permet de mettre à jour des amplis parfois très anciens ! On trouverait en effet anormal que celui qui a fait l'effort d'un bel achat se retrouve privé des progrès de la technique et doive racheter un appareil entier alors que quelques changements mineurs pourraient métamorphoser sa chaîne.

3) L'évolutivité ou « futur proofing » En tant que constructeurs, nous devons nous adapter à l'arrivée de nouveaux standards et de nouveaux formats. Ça ne se décide pas à notre niveau : ce sont souvent des guerres de colosses qui ont lieu entre des géants industriels, et ce n'est pas toujours le meilleur qui gagne. Par prudence, on attend un moment de voir « retomber la poussière », pour ne pas dilapider notre temps et notre argent en recherches, pour incrémenter un format mort dans l'oeuf. Construire un DAC durable est un véritable défi : Dans un DAC, il y a des parties qui pourraient fonctionner plus de 50 ans (peut-être d'avantage, mais pour l'instant c'est le recul dont on dispose !) , d'autres qui comportent des pièces d'usure, et enfin, les parties qui gèrent des signaux numériques.
On sait à quelle vitesse évoluent les standard numériques et avec quelle violence on nous les rend inutilisables (qui n'a jamais jeté, la mort dans l'âme, un scanner ou imprimante en parfait état de marche, que plus aucun système d’exploitation ne prend en charge... ?)


Klinger Favre Blindage inside DAC

 Pour répondre à ce défi, nous compartimentons les sections dans des tiroirs blindés. D'une part, cela évite les pollutions électromagnétiques d'une carte à l'autre. D'autre part, cela permet, dans la plupart des cas d'inter-changer les tiroirs les plus « menacés d'obsolescence ».

Klinger Favre Blindage inside DAC On nous demande souvent pourquoi nous ne fabriquons pas d'enceintes bluetooth, mais à nos yeux il s'agit là de greffer une technologie à très faible espérance de vie, sur un produit à très longue durée de vie ! Si un jour nous sautons le pas, l'architecture de l'enceinte sera certainement modulable, de manière à pourvoir by-passer le récepteur bluetooth lorsque ce format se sera perdu, pour la ramener à un état d'enceinte amplifiée, ou d'enceinte passive par exemple. Pour finir ce sujet, on vous a fait un petit montage (non exhaustif ) de 40 ans de design d'amplificateurs.

 Klinger Favre Amplificateur Amplifier